Apiculture. Illustration d’un traité médiéval sur la santé : Tacuinum sanitatis (Wikipedia).
L’abeille, emblème du Christ
Sylvain Campeau | 26 décembre 2022
Dans la Bible, on fait référence à ce petit insecte au ventre rayé plus d’une soixantaine de fois. On souligne son ardeur au travail et l’abondance du miel qu’il produit. Dans l’Ancien Testament, cette abondance en vient à caractériser la promesse divine d’un pays « ruisselant de lait et de miel », une expression qui revient à plusieurs reprises [1].
L’abeille laborieuse
« Va voir l’abeille et apprends comme elle est laborieuse. » (Proverbes 6,8) Commentant ce proverbe, Clément d’Alexandrie ajoute : « Car l’abeille butine sur les fleurs de tout un pré pour n’en former qu’un seul miel. » (Stromates 1) Ce commentaire souligne non seulement l’ardeur au travail des abeilles pour en faire un modèle de vertu, mais également leur objectif commun : pour les Pères de l’Église, la ruche devient ainsi une métaphore de la société humaine idéale.
Le miel et la Parole de Dieu
En hébreu, le nom de l’abeille (dbure) vient de la racine dbr, la même qui est utilisée pour former le mot parole. C’est sans doute le bourdonnement des abeilles qui permet cette analogie car il ressemble au mélange des voix d’un rassemblement de plusieurs personnes qui parlent en même temps.
Pour le psalmiste, la Parole de Dieu a plus de saveur que le miel : « Des chemins du mal, je détourne mes pas afin d’observer ta parole. Qu’elle est douce à mon palais ta promesse : le miel a moins de saveur dans ma bouche ! » (119,101.103) Cette association entre abeille et Parole divine a rapidement été adoptée par les premiers chrétiens pour parler du Christ.
L’abeille et le Christ
L’abeille est parfois associée au Christ Sauveur : le miel qu’elle produit évoque sa douceur et sa miséricorde : « Je suis doux et humble de cœur », peut-on lire dans l’évangile selon Matthieu (11,29). Mais le symbole est ambivalent car il évoque aussi le jugement à cause du dard de l’insecte : le venin injecté lors d’une piqure évoque la sévérité de la justice divine. Cette ambivalence est bien exploitée dans ce passage de l’Apocalypse : « Je pris le petit livre de la main de l’ange et le mangeai. Dans ma bouche il avait la douceur du miel, mais quand je l’eus mangé, mes entrailles en devinrent amères. » (10,10)
L’abeille est aussi associée au Christ, lumière du monde. C’est pour cette raison que les cierges utilisés dans les églises, et le cierge pascal en particulier, sont fabriqués de cire d’abeille.
L’observation des abeilles pendant l’hiver a fait surgir une autre association avec le Christ. Pendant trois mois, elles semblent disparaître car elles ne sortent pas de la ruche. Les abeilles deviennent ainsi un symbole de la résurrection car pendant trois jours, le Christ est resté au tombeau avant de réapparaître à nouveau, ressuscité d’entre les morts. Dans l’art paléochrétien, il est donc possible de voir des abeilles sur certains monuments funéraires pour évoquer la survie après la mort.
Diplômé en études bibliques (Université de Montréal), Sylvain Campeau est responsable de la rédaction.
[1] Dans les religions antiques et dans la religion hébraïque, le lait et le miel sont souvent associés. Dans le Pentateuque, par exemple, on retrouve cette association dans les passages suivants : Exode 3,8.17 ; 13,5 ; 33,3 ; Lévitique 20,24 ; 13,27 ; 14,8 ; 16,14 ; Nombres 16,13 ; Deutéronome 6,3 ; 11,9 ; 26,9.16 ; 27,3 ; 31,20.