La conversion de saint Paul sur le chemin de Damas. Luca Giordano, circa 1690. Musée des Beaux-Arts de Nancy (Wikipedia).
Conversion
Sylvain Campeau | 9 septembre 2019
Hébreu : chûb
Grec : metanoia ou epistrophê
La conversion est un thème qui traverse toute la Bible. Inspirée sans doute de l’image du chemin, elle implique l’idée d’un changement radical d’orientation. Elle caractérise, entre autres, le discours prophétique, le message de Jean le Baptiste et celui de Jésus ; et elle est à l’origine de l’activité missionnaire de l’apôtre Paul.
Dans la Bible hébraïque, le concept est rendu par la racine chûb (retourner) et ses dérivés. La traduction grecque de l’Ancien Testament utilise le mot epistrophê et le verbe epistrephein pour traduire cette idée, des termes repris par le Nouveau Testament. Mais le grec a aussi recours à une autre mot, metanoia, qui désigne un changement de mentalité, un détournement du mal, un terme souvent traduit en français par repentance.
L’Ancien Testament
Les livres historiques et prophétiques rapportent à maintes reprises les infidélités individuelles et collectives du peuple hébreu. La rupture de l’alliance entre Dieu et son peuple est vivement critiquée par les prophètes. Il n’est donc pas étonnant de constater que l’appel à la conversion est au cœur du discours prophétique. L’annonce du malheur ou la proclamation du jugement de Dieu accompagne cette invitation des prophètes. Le recours à ce motif littéraire chez les prophètes a pour objectif de convaincre leurs auditeurs de changer leur comportement. On peut parler d’une fonction « pédagogique » qui caractérise les textes prophétiques [1]. Dieu désire ardemment que le peuple revienne vers Lui (voir Am 4,4-12 où le verbe revenir est répété plusieurs fois, aux versets 6,8,9,10 et 11) et les prophètes font preuve de créativité dans le développement de leurs appels à la conversion.
Dans certains passages de l’Ancien Testament, l’appel à la conversion prend une dimension universelle et s’adresse aux nations (Is 19,22-25 ; 45,1-25 ; 66,18-21). Avant de rendre son dernier souffle, Tobit affirme clairement que le projet de Dieu pour son peuple concerne l’humanité entière : « Tous les peuples de la terre se convertiront. » (Tb 14,6)
Nouveau Testament
La prédication de Jean le Baptiste est essentiellement un appel à la conversion (Mt 3,2) accompagné d’un geste concret : l’immersion dans l’eau ou le baptême (Mc 1,4 ; Lc 3,3). C’est du moins le souvenir que nous en ont conservé les évangiles canoniques. L’intervention de Dieu est toute proche : il vient inaugurer son Règne. La mission du Baptiste est d’aider les humains à s’y préparer.
Le début du ministère de Jésus reprend cet appel (Mc 1,15 ; Mt 4,17) et la conversion occupe une place importante dans son enseignement (voir par exemple les trois paraboles de Luc 15 : la brebis égarée, la drachme perdue et le fils prodigue). Même ses miracles sont des appels à la repentance (Jn 5,14) et à la conversion (Mt 11,20). Quand l’appel à la conversion s’adresse à ceux et celles qui le suivent, Jésus leur demande de « devenir comme des enfants » (Mt 18,3), c’est-à-dire d’attendre tout de l’action transformante de Celui qui donne un sens à leur vie.
« Convertissez-vous ; que chacun de vous reçoive le baptême au nom de Jésus Christ pour le pardon de ses péchés, et vous recevrez le don du Saint Esprit. » (Actes 2,38, TOB)
La conversion est au cœur de la prédication apostolique et c’est elle qui est l’élément déclencheur du ministère de l’apôtre Paul. De persécuteur de l’Église, Paul devient un ardent défenseur de la foi en Jésus Christ. Sa conversion est racontée à plusieurs reprises (Ac 9,1-19 ; 22,4-21 ; 26,9-18) pour souligner l’importante mission confiée à Paul : porter le Nom du Seigneur devant les nations païennes.
Diplômé de l’Université de Montréal, Sylvain Campeau est bibliste et responsable de la rédaction.
[1] Pour une étude sommaire de l’appel à la conversion chez les prophètes et de la fonction du motif imprécatoire, on lira avec profit l’article de Pierre Gilbert : « L’appel à la conversion chez les prophètes de l’Ancien Testament », Science et Esprit 51/1 (1999) 81-94.