LA TERRE (3/4) | |||||
Au coeur du cycle vie-mort
Même si Israël s'est toujours refusé à diviniser les éléments et les forces de la nature, quelques traces du symbolisme de la terre-mère sont présentes dans la Bible. Il arrive en effet que la terre soit considérée comme génitrice. Elle donne naissance aux végétaux et aux animaux. Dans un éloge à la nature, le Siracide déclare : À la voix de son tonnerre la terre entre en travail (43, 17). En Zacharie 8, 12, la terre donne son fruit parce que fécondée par la rosée. Les fruits de la terre ne sont d'ailleurs pas que matériels; le Psaume 85, 12 dit que la vérité germera de la terre. Isaïe va dans le même sens en déclarant : que la terre s'ouvre et produise le salut, qu'elle fasse germer en même temps la justice (45, 8). Mais il tient à conclure ainsi : C'est moi, Yahvé, qui ai créé cela. Oui, la terre donne naissance, mais ne crée rien. Cela revient à Dieu seul. Dans la plupart des cas, cependant, la terre est perçue non comme la mère mais comme le matériau à partir duquel sont formés les êtres vivants. Le Qohélet le laisse bien entendre : Tout vient de la poussière tout s'en retourne à la poussière (3, 20). Le récit yahviste de la création va dans le même sens. Il décrit Dieu créant les êtres vivants à partir de la glaise du sol (Genèse 2, 7.19). Le mot hébreu pour désigner l'homme dans ce récit est d'ailleurs de la même racine que le mot terre. Encore ici, même si la terre joue un rôle déterminant dans la création, Dieu est toujours le principe de vie. La terre est aussi le lieu ou se régénère la vie. Après un séjour dans le sol, les morts sont invités par Isaïe à se relever : Réveillez-vous et chantez, vous qui habitez la poussière (26, 19). Une idée semblable se retrouve dans un récit de guérison de l'Évangile selon saint Jean (9, 6-15). Jésus applique de la boue sur les yeux d'un aveugle, exécutant une sorte de mise en terre symbolique des organes morts. Les yeux prennent vie et s'ouvrent même à des réalités qui échappent à la vision physique. Plutôt que la guérison, Jean souligne ici l'éveil de la foi du sujet. Dans un autre ordre d'idée, on trouve aussi dans la Bible le motif de la terre qui absorbe. Comme les êtres vivants retrouvent, en se décomposant, la condition matérielle de la terre, celle-ci symbolise la finitude de l'être humain. Au moment du décès, Dieu reprend le souffle qu'il avait donné. Dans l'Ancien Testament, la foi en la résurrection n'est apparue que très tardivement et discrètement. Une fois mort, les êtres vivants survivent mais sous la forme d'ombres. Ils se retrouvent dans un lieu appelé le shéol, le séjour des morts, ancêtre de l'enfer. La tradition biblique le situe dans les profondeurs de la terre, en un endroit impossible à localiser, qui n'a rien à voir avec le lieu de sépulture (Deutéronome 32, 22). Voici que mon amertume se change en bien-être. C'est toi qui as préservé mon âme de la fosse du néant, tu as jeté derrière toi tous mes péchés. Ce n'est pas le shéol qui te loue, ni la mort qui te célèbre. Ils n'espèrent plus en ta fidélité, ceux qui descendent dans la fosse. Le vivant, le vivant lui seul te loue, comme moi aujourd'hui (Isaie 38, 17-19). Jean Grou Pour lire la Bible... déterrée La terre génitrice : Zacharie 8, 9-13 Du sol germe la vérité : Psaume 85, 11-12 La terre matière première : Sagesse 15, 7-8 Les profondeurs: Ézéchiel 26, 19-21 Le séjour des morts : Psaume 88
Témoignage, protection et sainteté Chronique
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