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La filiation divine
Qu’est-ce que la filiation divine? Comment l’expliquer à partir des passages bibliques? (Mounkoro)
Le concept de filiation peut s’entendre à différents niveaux. Le plus évident et le plus commun est celui d’un père avec son fils. Il s’applique aussi en un sens abstrait à une relation père-fils spirituel. À cet effet, on sait bien que le père biologique a une mission de devenir aussi père spirituel... C’est ainsi q u’un prêtre parlera de son « fils spirituel » et celui-là de son « père spirituel ». Le premier niveau de sens étant le plus commun, arrêtons-nous au second. Chez les anciens, il était fréquent de se dire « fils d’un dieu » (cf. les noms dans 1 S 14,51 ; 2 S 23,31). Au Proche-Orient ancien, on considérait cette filiation divine comme une adoption qui devait apporter la protection du dieu. Le roi surtout était adopté par les divinités lors de son couronnement. C’était fréquent pour le pharaon en Égypte, pour les empereurs romains, et il y en a quelques traces dans la Bible, par exemple : « Tu es mon fils, moi aujourd’hui je t’ai engendré » Ps 2,7 (cf. 2 S 7,14 ; 1 Ch 22,10 ; Ps 89,27). Le peuple d’Israël est aussi appelé fils de Dieu (Ex 4,22-23 ; 2 S 7,14 ; Sg 9,7 ; 18,13). Il s’ensuit que toute personne qui a une relation spéciale avec le Seigneur est appelé son fils (Os 2,1 ; Ps 22,9 ; Sg 2,18). Si le judaïsme a appliqué les psaumes royaux au messie, il n’a cependant jamais appelé le messie fils de Dieu.
Au sujet de Jésus, de nombreux passages néotestamentaires parlent du Dieu de Jésus en terme de « Père » et de Jésus en terme de « Fils » (par exemple Mt 11,24-27 ; Mc 8,38 ; Lc 1,32 ; Jn 1,18 ; 3,35 ; 5,19.20-23.26 ; 6,40 ; 8,28 ; 10,36 ; 14,13 ; 17,1). Quant à l’expression « fils de Dieu » elle ne se trouve pas dans les évangiles synoptiques et est rare en Jean ; par contre, elle devient beaucoup plus fréquente dans les Actes des apôtres, les lettres pauliniennes et les lettre de Jean, ce qui suggère qu’il s’agit là plus d’un développement de la première théologie chrétienne qu’une conscience explicite de Jésus (ce qui ne veut pas dire qu’on se trompe en considérant Jésus comme Fils de Dieu). Il a donc fallu que la première théologie chrétienne essaie de concevoir cette relation père-fils et à l’expliquer. Il était évident que le premier niveau « biologique » ne convenait pas. Quant au second, il apparut très tôt que la simple filiation spirituelle ne rendait pas compte de la véritable relation de Jésus avec le Père. La théologie chrétienne y a donc vu la révélation du mystère de la Trinité. Mais là, on est déjà en dehors de la Bible et c’est à la théologie qu’il faut s’adresser.
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